vendredi 7 février 2014

La situation en Thaïlande Février 2014


Vous l'avez peut être vu dans les médias, surement par hasard tant l'info sur la Thaïlande y est infinitésimales, mais la situation s'y dégrade lentement mais sûrement.
Bombes, manifestations quasi quotidiennes, élections boycottée, bloc qui s'affrontent, chemises rouges contres chemises jaunes.
Les médias, dans leur grande majorité, qui ignorent la situation, savent ils qu'elle risque de déstabiliser toute l'Asie du sud est ?



Comment en est on arrivé là ?

Pour comprendre ce qu'il se passe aujourd'hui il faut remonter dans le passé. La Thaïlande est un état autoritaire et monarchique ou il y a eu des épisodes démocratique.
Majoritairement bouddhiste au nord, il a aussi des minorités musulmanes dans le sud.
Coincés entre la Birmanie et le Cambodge avec qui les relations sont tendues, moins avec la Birmanie depuis l'assouplissement de la junte militaire au pouvoir et la libération du prix Nobel de la paix Aung San Suu Kyi.

En 2006 Taksin remporte les élections législative et se fait nommer 1er ministre, des soupçons de corruption et d'achats de votes dans les campagnes de l'ouest Thaïlandais se font connaître.
Mais comme Taksin promet des réformes, notamment pour améliorer les conditions de vie des Thaïs des campagnes, et faire diminuer la fracture entre Thaïs des villes, et Thaïs des campagnes, il a le soutien d'une majorité populaire.
Lors d'un voyage à New York pour se rendre au conseil de sécurité de l'ONU, l'armée se déploie en Thaïlande, prends le pouvoir, et interdit le retour en Thaïlande de Taksin.
Arborant des fleurs jaunes, l'armée montre tout de suite qu'elle se place sous l'autorité du roi (Le jaune est la couleur du roi).


Un gouvernement est formé, avec « seulement » deux anciens militaires, mais personne n'est dupe que c'est l'armée qui en coulisse dirige le pays.
Une nouvelle constitution est proposée par référendum, et adoptée, qui renforce les pouvoirs de l'armée, et diminue l'influence du parlement, et il y a promesse d'éléctions législative en 2007.

Le 23 décembre 2007 le parti du pouvoir du peuple, le PPP, remporte 232 sièges sur 280 à la déception des militaires putschistes.
Abhisit Vejjajiva devient le nouveau premier ministre avec mandat de 5 ans, soutenu par les généraux, la noblesse et les milieux d'affaires.

Au printemps 2010 les chemises rouge de L'UDD, union démocratique du peuple contre la dictature, comptant une majorité de membres fidèles à Thaksin « monte » sur Bangkok pour occuper le centre de la ville .


copyright l'express.fr

Pendant un mois ils ont un campement dans le Siam square et à coté du trade center.

souce : http://laboratoireurbanismeinsurrectionnel.blogspot.com

Les forces armées donnent l'assaut le 19 mai, les manifestants ripostent puis se rendent mais la répression sanglante continue et au moins 75 personnes sont tuées. Le gouvernement ne cède à aucune des revendications, pas d'élections anticipées.

photo : Des manifestant déversent leur propre  sang pour dénoncer la brutalité policière.

  


la Cour criminelle de Bangkok a émis le 25 mai 2010, un mandat d’arrêt international pour « terrorisme » contre Thaksin Shinawatra.
Des élections législatives se tiennent le 03 juillet 2011, suite à la dissolution de la Chambre des représentants le 10 mai 2011 par décret royal. 47 millions de Thaïlandais étaient appelés aux urnes dans un pays où le vote est obligatoire.
Yingluck Shinawatra, sœur cadette de l'ancien premier ministre Thaksin Shinawatra, renversé en 2006 et en exil à Londres depuis, l'emporte par une majorité absolue des voix et obtient 265 sièges sur les 500 de la Chambre des représentants.
En 2012, elle propose un projet de révision de la Constitution adoptée en 2007 en convoquant un référendum.



Fin 2013, accusée d'être la marionnette politique de son frère, toujours en exil, elle est la cible de manifestations de l'opposition (urbaine et royaliste, alors que le Premier ministre est soutenue par les paysans ruraux) qui demandent sa démission, alors qu'est envisagé un projet d'amnistie pouvant faciliter le retour de Thaksin en Thaïlande.

copyright rfi


Même si des milliers de manifestants réussissent à envahir le siège du gouvernement, cette action n'est pas considérée comme une victoire politique, alors qu'une trêve a lieu pour célébrer les 86 ans du roi Bhumitbol et que l'armée refuse de prendre position. Elle décide finalement de dissoudre le Parlement et d'organiser des élections législatives anticipées, qui se tiendront le 2 février 2014.

Fin de l'histoire ?

Pas vraiment.
Avec des bombes posées dans Bangkok ayant fait des morts, des manifestations quasi quotidiennes, dont celles des « riches » qui défilent en voiture de luxe refusant que le peuple rural de la Thaïlande accède à de meilleures conditions de vie, et un écart qui semble maintenant difficile à combler entre Thaïs des villes (les chemises jaunes), et Thaïs des campagnes (chemises rouge) ; la situatin semble bien compliquée pour n'importe quel gouvernement.


Et le roi dans tout ça ?
Bien affaiblie par son age et la maladie, le roi Bhumitbol semble impuissant à enrayer la situation et son influence 'est plus ce qu'elle était.
Adoré par la grande majorité des Thaïs, quelque soit leurs origines, ou opinions politique, le roi a fait faire d'immenses réformes à son pays, le faisant entré dans la modernité.


copyright Le point.fr

Ces réformes ont profitées à tous, d'où sa quasi vénération . Et si le décès du roi devait intervenir avant la fin de cette période de troubles, il y a fort à parier que cela pourrait être l'étincelle de trop.
Son fils Le prince Maha Vajiralongkorn a été proche de Taksin, et soupçonné d'avoir des liens financiers avec lui. Il est impopulaire, et même si son influence politique a grandie, on le voit de plus en plus remplacer son père aux cérémonies officielles, son accession au trône ne ferait que compliquer les choses.

sources noblessesetroyautés.com


Dans le sud de la Thaïlande la situation est comliquée depuis 1970, ou des groupes minoritaires musulmans demandent leurs autonomie. Refusée bien entendu, et réprimée durement par l'armée.
Résultat, depuis 2005, des troubles réguliers avec jet de cocktails molotov sur des bâtiments officiels et assassinat de bonzes.

Avec la Birmanie la situation s'est légèrement apaisée depuis la timide ouverture de la junte militaire au pouvoir. La situation s'était dégradée avec les Karens, peuple martyrisée par la junte et réfugiée dans l'ouest de la Thaïlande qui organisait régulièrement des raids de guérilla contre la Birmanie, et avec la bénédiction officieuse de la Thaïlande.
La Birmanie découvrant la démocratie, a mieux à faire, et semble laisser son voisin en paix, du moins pour le moment.
Pour exemple, à chaque fois que la situation se dégradait en Thaïlande, des ordres étaient donnés pour renforcer la présence militaire le long de la frontière Birmane pour parer à toute tentative d'invasion de la Thaïlande par la Birmanie.

Avec la Cambodge, la situation reste compliquée, tout à démarrer en juin 2008 quand la Thaïlande à revendiqué le temple Preah Vihear. Ce temple est situé au Cambodge mais sur le rebord d'une falaise, en arrière de la ligne de crête des monts Dangrek qui marque la frontière entre les deux pays, si bien que l'accès routier à ce temple depuis le Cambodge ne peut se faire que via la Thaïlande

crédits wikipédia.org


Résultat le Cambodge dépêche des troupes sur place, et des affrontements entre armée Thaï et Khmer font des morts et des blessés.
La Thaïlande comptait profiter de la faiblesse supposée de son voisin Cambodgien, mais c'était ignorer que l'armée du Cambodge est essentiellement constituée d'ancien khmers rouge, endurcit au combat, habitué aux conditions difficile de la guérilla en pleine jungle, bref pas des marrants les gars !



En 2011, des échanges de tirs ont lieu aux alentours du temple, entre soldats cambodgiens et thaïlandais. Cinq personnes sont tuées lors de la première semaine de février, des « milliers de villageois » évacués, et le 6 février l'armée cambodgienne publie un communiqué indiquant qu'une aile du temple s'est effondrée sous des bombardements thaïlandais.

copyright courrierinternational.com


En décembre 2011, les deux pays signent des accords prévoyant le retrait des troupes stationnées de chaque côté de la frontière

A l'heure d'aujourd'hui la situation n'est toujours pas réglée, les forces en présence étant restées in statu quo ante bellum.
 Le lien vers l'excellent article du courrier international:
http://www.courrierinternational.com/article/2013/04/18/un-conflit-frontalier-sans-fin

Ou va la Thaïlande ?

Le 02 février 2014 des élections législatives anticipées ont eu lieu, mais boycottée par l'opposition et très perturbée par des manifestants voulant empêcher les bureaux de votes de travailler, de l'aveu de pas mal de spécialistes du sud est asiatique, tout le monde s'accorde à dire que leur impact sera faible sur la situation du pays.




Depuis les émeutes durement réprimées du printemps 2010, et les bombes explosant dans Bangkok faisant des mort de la fin de l'année 2013, début d'année 2014, la fracture semble consommée entre les chemises jaune, surtout les nobles, les milieux d'affaires et les cadres de l'armée, et les chemises rouge qui demandent plus de reconnaissance, et une revalorisation de leurs conditions de vie.
Il n'y a pas de personnalités fédératrice et populaire capable de s'imposer comme un recours naturel pour arranger la situation, et les troubles grandissants avec les minorités musulmanes du sud s'intensifient.
A moins d'un sursaut national, j'ai l'impression d'assister à la course folle d'une voiture fonçant contre un mur, qui accélèrerait à son approche au lieu de ralentir.
Et malheureusement il n'y a qu'une chose à faire, attendre la publication des résultats des éléctions du 2 février 2014, et attendre.

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